Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 6,1-15.
En ce temps-là, Jésus s'en alla de l'autre côté de la mer de Galilée ou de Tibériade.
Et une foule nombreuse le suivait, parce qu'elle voyait les miracles qu'il opérait sur ceux qui étaient malades.
Jésus monta sur la montagne, et là, il s'assit avec ses disciples.
Or la Pâque, la fête des Juifs était proche.
Jésus donc ayant levé les yeux, et voyant qu'une grande foule venait à lui, dit à Philippe : "Où achèterons-nous du pain pour que ces gens aient à manger ?"
Il disait cela pour l'éprouver, car lui, il savait ce qu'il devait faire.
Philippe lui répondit : "Deux cents deniers de pain ne suffiraient pas pour que chacun en reçoive un morceau."
Un de ses disciples, André, frère de Simon-Pierre, lui dit :
"Il y a ici un jeune homme qui a cinq pains d'orge et deux poissons ; mais qu'est-ce que cela pour tant de monde ?"
Jésus dit : "Faites les asseoir." Il y avait beaucoup d'herbe en ce lieu. Ils s'assirent donc, au nombre d'environ cinq mille.
Jésus prit les pains, et ayant rendu grâces, il les distribua à ceux qui étaient assis ; il leur donna de même des deux poissons, autant qu'ils en voulurent.
Lorsqu'ils furent rassasiés, il dit à ses disciples : "Recueillez les morceaux qui restent, afin que rien ne se perde."
Ils les recueillirent, et remplirent douze corbeilles des morceaux qui étaient restés des cinq pains d'orge, après qu'ils eurent mangé.
Ces hommes ayant vu le miracle que Jésus avait fait, disaient : "Celui-ci est vraiment le Prophète qui doit venir dans le monde."
Sachant donc qu'ils allaient venir l'enlever pour le faire roi, Jésus se retira de nouveau, seul, sur la montagne.
Extrait de la Traduction de l'évangile selon le missel catholique Romain Tridentin.
Correspondance dans "l’Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta : Tome 4, Ch 136, p 328 - CD 4 (2ème cd), piste 137 -
C'est toujours le même endroit. Seulement le soleil ne vient plus de l'orient en filtrant à travers le fourré qui borde le Jourdain en ce lieu sauvage près de l'endroit où les eaux du lac débouchent dans le lit du fleuve, mais il arrive, pareillement oblique, du couchant, pendant qu'il descend dans une gloire de rouge, en rayant le ciel de ses derniers rayons. Et sous l'épais feuillage, la lumière est très adoucie et tend vers les teintes paisibles du soir. Les oiseaux, enivrés du soleil qu'ils ont eu tout le jour, de la nourriture abondante qu'ils ont prise dans les campagnes voisines, se livrent à une bacchanale de trilles et de chants au sommet des arbres. Le soir tombe avec les pompes finales de la journée. Les apôtres le font remarquer à Jésus qui donne toujours son enseignement d'après les exemples qui se présentent à Lui. “Maître, le soir approche, l'endroit est désert, éloigné des maisons et des villages, ombreux et humide. Sous peu, ici il ne sera plus possible de nous voir ni de marcher. La lune se lève tard. Renvoie le peuple pour qu'il aille à Tarichée ou aux villages du Jourdain pour acheter de la nourriture et chercher un logement.” “Il n'est pas nécessaire qu'ils s'en aillent. Donnez-leur à manger. ils peuvent dormir ici comme ils ont dormi en m'attendant.” “Il ne nous reste que cinq pains et deux poissons, Maître, tu le sais.” “Apportez-les-moi.” “André, va chercher l'enfant. C'est lui qui garde la bourse. Il y a peu de temps il était avec le fils du scribe et deux autres, occupé à se faire des couronnes de fleurs en jouant au roi.” André y va vivement et aussi Jean et Philippe se mettent à chercher Margziam. dans la foule toujours en déplacement. Ils le trouvent presque en même temps, avec son sac de vivres en bandoulière, un long sarment de clématite enroulé autour de la tête et une ceinture de clématite de laquelle pend, en guise d'épée, une massette dont la garde est la massette proprement dite, la lame sa tige. Avec lui, il y en a sept autres pareillement chamarrés, et ils font un cortège au fils du scribe, un enfant très grêle, avec l'œil très sérieux de qui a tant souffert qui, plus fleuri que les autres, tient le rôle de roi. “Viens, Margziam. Le Maître te demande!” Margziam. plante là ses amis et s'en va rapidement, sans même enlever ses… ornements floraux, mais les autres le suivent aussi et Jésus est vite entouré d'une couronne d'enfants enguirlandés. Il les caresse pendant que Philippe sort du sac un paquet avec du pain, au milieu duquel sont enveloppés deux gros poissons: deux kilos de poissons, un peu plus. Insuffisants même pour les dix-sept, ou plutôt les dix-huit avec Manaën, de la troupe de Jésus. On apporte ces vivres au Maître. “C'est bien. Maintenant apportez-moi dés paniers. Dix-sept, un pour chacun. Margziam donnera la nourriture aux enfants…” Jésus regarde fixement le scribe qui est toujours resté près de Lui et lui demande: “Veux-tu donner, toi aussi, la nourriture aux affamés?” “Cela me plairait, mais moi aussi j'en suis démuni.” “Donne la mienne. Je te le permets.” “Mais… tu as l'intention de rassasier presque cinq mille hommes, et en plus les femmes et les enfants, avec ces deux poissons et ces cinq pains?” “Sans aucun doute. Ne sois pas incrédule. Celui qui croit, verra s'accomplir le miracle.” “Oh! alors, je veux bien distribuer la nourriture, moi aussi!” “Alors, fais-toi donner un panier, toi aussi.” Les apôtres reviennent avec des paniers et des corbeilles larges et peu profonds, ou bien profonds et étroits. Et le scribe revient avec un panier plutôt petit. On se rend compte que sa foi ou son manque de foi lui l'a fait choisir comme le plus grand possible. “C'est bien. Mettez tout ici devant et faites asseoir les foules en ordre, en rangs réguliers, autant que possible.” Et pendant cette opération, Jésus élève les pains avec les poissons par dessus, les offre, prie et bénit. Le scribe ne le quitte pas un instant des yeux. Puis, Jésus rompt les cinq pains en dix-huit parts et de même les deux poissons en dix-huit parts. Il met un morceau de poisson, un bien petit morceau, dans chaque panier et fait des bouchées avec les dix-huit morceaux de pain. Chaque morceau en plusieurs bouchées. Elles sont nombreuses relativement: une vingtaine, pas plus. Chaque morceau est placé dans un panier, après avoir été fragmenté, avec le poisson. “Et maintenant prenez et donnez à satiété. Allez. Va, Margziam, le donner à tes compagnons.” “Oh! comme c'est lourd!” dit Margziam en soulevant son panier et en allant tout de suite vers ses petits amis. Il marche comme s'il portait un fardeau. Les apôtres, les disciples, Manaën, le scribe le regardent partir ne sachant que penser… Puis ils prennent les paniers, et en secouant la tête, se disent l'un à l'autre: “Le gamin plaisante! Ce n'est pas plus lourd qu'avant.” Le scribe regarde aussi à l'intérieur et met la main pour tâter au fond du panier parce qu'il n'y a plus beaucoup de lumière, là, sous le couvert où Jésus se trouve, alors que plus loin, dans la clairière, il fait encore assez clair. Mais pourtant, malgré la constatation, ils vont vers les gens et commencent la distribution. Ils donnent, ils donnent, ils donnent. Et de temps à autre, ils se retournent, étonnés, de plus en plus loin, vers Jésus qui, les bras croisés, adossé à un arbre, sourit finement de leur stupeur. La distribution est longue et abondante… Le seul qui ne manifeste pas d'étonnement c'est Margziam qui rit, heureux de remplir de pain et de poisson les mains de tant de pauvres enfants. Il est aussi le premier à revenir vers Jésus, en disant: “J'ai tant donné, tant, tant!… car je sais ce que c'est que la faim…” et il lève son visage qui n'est plus émacié qu'en un souvenir maintenant disparu, cependant il pâlit, en écarquillant les yeux… Mais Jésus le caresse et le sourire revient, lumineux, sur ce visage enfantin qui, confiant, s'appuie contre Jésus, son Maître et Protecteur. Tout doucement les apôtres et les disciples reviennent, rendus muets par la stupeur. Le dernier, le scribe qui ne dit rien. Mais il fait un geste qui est plus qu'un discours: il s'agenouille et baise la frange du vêtement de Jésus. “Prenez votre part, et donnez m'en un peu. Mangeons la nourriture de Dieu.” Ils mangent en effet du pain et du poisson, chacun selon son appétit… Pendant ce temps, les gens, rassasiés, échangent leurs impressions. Même ceux qui sont autour de Jésus se risquent à parler en regardant Margziam qui, en finissant son poisson, plaisante avec les autres enfants. “Maître” demande le scribe, “pourquoi l'enfant a-t-il tout de suite senti le poids, et nous pas? J'ai même fouillé à l'intérieur. Il n'y avait toujours que ces quelques bouchées de pain et cet unique morceau de poisson. J'ai commencé à sentir le poids en allant vers la foule, mais si cela avait pesé pour la quantité que j'ai donné, il aurait fallu un couple de mulets pour le transport, non plus le panier, mais un char complet chargé de nourriture. Au début, j'y allais doucement… puis je me suis mis à donner, à donner, et pour ne pas être injuste, je suis revenu vers les premiers en faisant une nouvelle distribution parce qu'aux premiers j'avais donné peu de chose. Et pourtant, il y en a eu assez.” “Moi aussi, j'ai senti que le panier devenait lourd pendant que j'avançais, et tout de suite j'ai donné abondamment, car j'ai compris que tu avais fait un miracle” dit Jean. “Moi, au contraire, je me suis arrêté et me suis assis, pour renverser sur mon vêtement le fardeau et me rendre compte… Alors j'ai vu des pains et des pains, et j'y suis allé” dit Manaën. “Moi, je les ai même compté pour ne pas faire piètre figure. Il y avait cinquante petits pains. Je me suis dit: "Je vais les donner à cinquante personnes, et puis je reviendrai". Et j'ai compté. Mais, arrivé à cinquante, il y avait toujours le même poids. J'ai regardé à l'intérieur. Il y en avait encore tant. Je suis allé de l'avant et j'en ai donné par centaine. Mais cela ne diminuait jamais” dit Barthélémy. “Moi, je le reconnais, je n'y croyais pas. J'ai pris dans mes mains les bouchées de pain et ce petit morceau de poisson et je les regardais en disant: "A quoi cela va servir? Jésus a voulu plaisanter!…" et je les regardais, je les regardais, restant caché derrière un arbre, espérant et désespérant de les voir croître. Mais c'était toujours la même chose. J'allais revenir quand Mathieu est passé et m'a dit: "Tu as vu comme ils sont beaux?". "Quoi?" ai-je dit. "Mais les pains et les poissons!… Tu es fou? Moi je vois toujours des morceaux de pain". "Va les distribuer avec foi, et tu verras". J'ai jeté dans le panier ces quelques bouchées et je suis allé avec réticence… Et puis… Pardonne-moi, Jésus, car je suis un pécheur!” dit Thomas. “Non, tu es un esprit du monde. Tu raisonnes comme les gens du monde.” “Moi aussi, Seigneur, alors” dit l'Iscariote. “Au point que j'ai pensé donner une pièce avec le pain en pensant: "Ils mangeront ailleurs. J'espérais t'aider à faire meilleure figure. Que suis-je donc, moi? Comme Thomas ou davantage?” “Bien plus que Thomas, tu es "monde".” “Mais pourtant j'ai pensé faire l'aumône pour être Ciel! C'étaient mes deniers à moi…” “Aumône à toi-même et à ton orgueil et non pas à Dieu. Ce dernier n'en a pas besoin et l'aumône à ton orgueil est une faute, pas un mérite.” Judas baisse la tête et se tait. “Moi, de mon côté” dit Simon le Zélote “je pensais que cette bouchée de poisson, ces bouchées de pain, il me fallait les fragmenter pour qu'elles suffisent. Mais je ne doutais pas qu'elles auraient suffi pour le nombre et la valeur nutritive. Une goutte d'eau, donnée par Toi, peut être plus nourrissante qu'un banquet.” “Et vous, que pensiez-vous?” demande Pierre aux cousins de Jésus. “Nous nous rappelions Cana… et nous ne doutions pas” dit sérieusement Jude. “Et toi, Jacques, mon frère, tu n'as pensé qu'à cela?” “Non. J'ai pensé que c'était un sacrement. Comme tu m'en as parlé… Est-ce ainsi ou je me trompe?” Jésus sourit: “Oui et non. A la vérité de la puissance nutritive d'une goutte d'eau, exprimée par Simon, il faut ajouter ta pensée pour une figure lointaine. Mais ce n'est pas encore un sacrement.” Le scribe garde une croûte entre ses doigts. “Qu'en fais-tu?” “Un… souvenir.” “Je la garde, moi aussi. Je la mettrai au cou de Margziam dans un sachet” dit Pierre. “Moi, je la porterai à notre mère” dit Jean. “Et nous? Nous avons tout mangé…” disent les autres, mortifiés. “Levez-vous. Faites de nouveau le tour avec les paniers, recueillez les restes. Séparez les gens les plus pauvres d'avec les autres et amenez-les-moi ici, avec les paniers. Et puis vous, mes disciples, allez tous vers les barques et prenez le large pour aller à la plaine de Génésareth. Je vais congédier les gens après avoir fait une distribution aux plus pauvres et puis je vous rejoindrai.” Les apôtres obéissent… et reviennent avec douze paniers combles de restes, et suivis d'une trentaine de mendiants ou de personnes très misérables. “C'est bien. Allez.” Les apôtres et ceux de Jean saluent Manaën et s'en vont avec un peu de regret de quitter Jésus. Mais ils obéissent. Manaën attend, pour quitter Jésus, que la foule, aux dernières lueurs du jour, s'en aille vers les villages ou cherche une place pour dormir parmi les joncs hauts et secs. Puis il fait ses adieux. Avant lui s'en est allé le scribe, un des premiers même, parce que, avec son petit garçon, il a suivi les apôtres. Lorsque tout le monde est parti ou s'est endormi, Jésus se lève, bénit les dormeurs et à pas lents se dirige vers le lac, vers la péninsule de Tarichée élevée de quelques mètres comme si c'était une avancée de colline dans le lac. Lorsqu'il en a rejoint le pied, sans entrer dans la ville, mais en la côtoyant, il gravit le monticule et s'installe sur un rocher, pour prier, face à l'azur et à la blancheur du clair de lune dans la nuit sereine.
Extrait de la Traduction de “L’évangile tel qu’il m’a été révélé” de Maria Valtorta ©Centro Editoriale Valtortiano, Italie http://www.mariavaltorta.com/
En ce temps-là, Jésus s'en alla de l'autre côté de la mer de Galilée ou de Tibériade.
Et une foule nombreuse le suivait, parce qu'elle voyait les miracles qu'il opérait sur ceux qui étaient malades.
Jésus monta sur la montagne, et là, il s'assit avec ses disciples.
Or la Pâque, la fête des Juifs était proche.
Jésus donc ayant levé les yeux, et voyant qu'une grande foule venait à lui, dit à Philippe : "Où achèterons-nous du pain pour que ces gens aient à manger ?"
Il disait cela pour l'éprouver, car lui, il savait ce qu'il devait faire.
Philippe lui répondit : "Deux cents deniers de pain ne suffiraient pas pour que chacun en reçoive un morceau."
Un de ses disciples, André, frère de Simon-Pierre, lui dit :
"Il y a ici un jeune homme qui a cinq pains d'orge et deux poissons ; mais qu'est-ce que cela pour tant de monde ?"
Jésus dit : "Faites les asseoir." Il y avait beaucoup d'herbe en ce lieu. Ils s'assirent donc, au nombre d'environ cinq mille.
Jésus prit les pains, et ayant rendu grâces, il les distribua à ceux qui étaient assis ; il leur donna de même des deux poissons, autant qu'ils en voulurent.
Lorsqu'ils furent rassasiés, il dit à ses disciples : "Recueillez les morceaux qui restent, afin que rien ne se perde."
Ils les recueillirent, et remplirent douze corbeilles des morceaux qui étaient restés des cinq pains d'orge, après qu'ils eurent mangé.
Ces hommes ayant vu le miracle que Jésus avait fait, disaient : "Celui-ci est vraiment le Prophète qui doit venir dans le monde."
Sachant donc qu'ils allaient venir l'enlever pour le faire roi, Jésus se retira de nouveau, seul, sur la montagne.
Extrait de la Traduction de l'évangile selon le missel catholique Romain Tridentin.
Correspondance dans "l’Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta : Tome 4, Ch 136, p 328 - CD 4 (2ème cd), piste 137 -
C'est toujours le même endroit. Seulement le soleil ne vient plus de l'orient en filtrant à travers le fourré qui borde le Jourdain en ce lieu sauvage près de l'endroit où les eaux du lac débouchent dans le lit du fleuve, mais il arrive, pareillement oblique, du couchant, pendant qu'il descend dans une gloire de rouge, en rayant le ciel de ses derniers rayons. Et sous l'épais feuillage, la lumière est très adoucie et tend vers les teintes paisibles du soir. Les oiseaux, enivrés du soleil qu'ils ont eu tout le jour, de la nourriture abondante qu'ils ont prise dans les campagnes voisines, se livrent à une bacchanale de trilles et de chants au sommet des arbres. Le soir tombe avec les pompes finales de la journée. Les apôtres le font remarquer à Jésus qui donne toujours son enseignement d'après les exemples qui se présentent à Lui. “Maître, le soir approche, l'endroit est désert, éloigné des maisons et des villages, ombreux et humide. Sous peu, ici il ne sera plus possible de nous voir ni de marcher. La lune se lève tard. Renvoie le peuple pour qu'il aille à Tarichée ou aux villages du Jourdain pour acheter de la nourriture et chercher un logement.” “Il n'est pas nécessaire qu'ils s'en aillent. Donnez-leur à manger. ils peuvent dormir ici comme ils ont dormi en m'attendant.” “Il ne nous reste que cinq pains et deux poissons, Maître, tu le sais.” “Apportez-les-moi.” “André, va chercher l'enfant. C'est lui qui garde la bourse. Il y a peu de temps il était avec le fils du scribe et deux autres, occupé à se faire des couronnes de fleurs en jouant au roi.” André y va vivement et aussi Jean et Philippe se mettent à chercher Margziam. dans la foule toujours en déplacement. Ils le trouvent presque en même temps, avec son sac de vivres en bandoulière, un long sarment de clématite enroulé autour de la tête et une ceinture de clématite de laquelle pend, en guise d'épée, une massette dont la garde est la massette proprement dite, la lame sa tige. Avec lui, il y en a sept autres pareillement chamarrés, et ils font un cortège au fils du scribe, un enfant très grêle, avec l'œil très sérieux de qui a tant souffert qui, plus fleuri que les autres, tient le rôle de roi. “Viens, Margziam. Le Maître te demande!” Margziam. plante là ses amis et s'en va rapidement, sans même enlever ses… ornements floraux, mais les autres le suivent aussi et Jésus est vite entouré d'une couronne d'enfants enguirlandés. Il les caresse pendant que Philippe sort du sac un paquet avec du pain, au milieu duquel sont enveloppés deux gros poissons: deux kilos de poissons, un peu plus. Insuffisants même pour les dix-sept, ou plutôt les dix-huit avec Manaën, de la troupe de Jésus. On apporte ces vivres au Maître. “C'est bien. Maintenant apportez-moi dés paniers. Dix-sept, un pour chacun. Margziam donnera la nourriture aux enfants…” Jésus regarde fixement le scribe qui est toujours resté près de Lui et lui demande: “Veux-tu donner, toi aussi, la nourriture aux affamés?” “Cela me plairait, mais moi aussi j'en suis démuni.” “Donne la mienne. Je te le permets.” “Mais… tu as l'intention de rassasier presque cinq mille hommes, et en plus les femmes et les enfants, avec ces deux poissons et ces cinq pains?” “Sans aucun doute. Ne sois pas incrédule. Celui qui croit, verra s'accomplir le miracle.” “Oh! alors, je veux bien distribuer la nourriture, moi aussi!” “Alors, fais-toi donner un panier, toi aussi.” Les apôtres reviennent avec des paniers et des corbeilles larges et peu profonds, ou bien profonds et étroits. Et le scribe revient avec un panier plutôt petit. On se rend compte que sa foi ou son manque de foi lui l'a fait choisir comme le plus grand possible. “C'est bien. Mettez tout ici devant et faites asseoir les foules en ordre, en rangs réguliers, autant que possible.” Et pendant cette opération, Jésus élève les pains avec les poissons par dessus, les offre, prie et bénit. Le scribe ne le quitte pas un instant des yeux. Puis, Jésus rompt les cinq pains en dix-huit parts et de même les deux poissons en dix-huit parts. Il met un morceau de poisson, un bien petit morceau, dans chaque panier et fait des bouchées avec les dix-huit morceaux de pain. Chaque morceau en plusieurs bouchées. Elles sont nombreuses relativement: une vingtaine, pas plus. Chaque morceau est placé dans un panier, après avoir été fragmenté, avec le poisson. “Et maintenant prenez et donnez à satiété. Allez. Va, Margziam, le donner à tes compagnons.” “Oh! comme c'est lourd!” dit Margziam en soulevant son panier et en allant tout de suite vers ses petits amis. Il marche comme s'il portait un fardeau. Les apôtres, les disciples, Manaën, le scribe le regardent partir ne sachant que penser… Puis ils prennent les paniers, et en secouant la tête, se disent l'un à l'autre: “Le gamin plaisante! Ce n'est pas plus lourd qu'avant.” Le scribe regarde aussi à l'intérieur et met la main pour tâter au fond du panier parce qu'il n'y a plus beaucoup de lumière, là, sous le couvert où Jésus se trouve, alors que plus loin, dans la clairière, il fait encore assez clair. Mais pourtant, malgré la constatation, ils vont vers les gens et commencent la distribution. Ils donnent, ils donnent, ils donnent. Et de temps à autre, ils se retournent, étonnés, de plus en plus loin, vers Jésus qui, les bras croisés, adossé à un arbre, sourit finement de leur stupeur. La distribution est longue et abondante… Le seul qui ne manifeste pas d'étonnement c'est Margziam qui rit, heureux de remplir de pain et de poisson les mains de tant de pauvres enfants. Il est aussi le premier à revenir vers Jésus, en disant: “J'ai tant donné, tant, tant!… car je sais ce que c'est que la faim…” et il lève son visage qui n'est plus émacié qu'en un souvenir maintenant disparu, cependant il pâlit, en écarquillant les yeux… Mais Jésus le caresse et le sourire revient, lumineux, sur ce visage enfantin qui, confiant, s'appuie contre Jésus, son Maître et Protecteur. Tout doucement les apôtres et les disciples reviennent, rendus muets par la stupeur. Le dernier, le scribe qui ne dit rien. Mais il fait un geste qui est plus qu'un discours: il s'agenouille et baise la frange du vêtement de Jésus. “Prenez votre part, et donnez m'en un peu. Mangeons la nourriture de Dieu.” Ils mangent en effet du pain et du poisson, chacun selon son appétit… Pendant ce temps, les gens, rassasiés, échangent leurs impressions. Même ceux qui sont autour de Jésus se risquent à parler en regardant Margziam qui, en finissant son poisson, plaisante avec les autres enfants. “Maître” demande le scribe, “pourquoi l'enfant a-t-il tout de suite senti le poids, et nous pas? J'ai même fouillé à l'intérieur. Il n'y avait toujours que ces quelques bouchées de pain et cet unique morceau de poisson. J'ai commencé à sentir le poids en allant vers la foule, mais si cela avait pesé pour la quantité que j'ai donné, il aurait fallu un couple de mulets pour le transport, non plus le panier, mais un char complet chargé de nourriture. Au début, j'y allais doucement… puis je me suis mis à donner, à donner, et pour ne pas être injuste, je suis revenu vers les premiers en faisant une nouvelle distribution parce qu'aux premiers j'avais donné peu de chose. Et pourtant, il y en a eu assez.” “Moi aussi, j'ai senti que le panier devenait lourd pendant que j'avançais, et tout de suite j'ai donné abondamment, car j'ai compris que tu avais fait un miracle” dit Jean. “Moi, au contraire, je me suis arrêté et me suis assis, pour renverser sur mon vêtement le fardeau et me rendre compte… Alors j'ai vu des pains et des pains, et j'y suis allé” dit Manaën. “Moi, je les ai même compté pour ne pas faire piètre figure. Il y avait cinquante petits pains. Je me suis dit: "Je vais les donner à cinquante personnes, et puis je reviendrai". Et j'ai compté. Mais, arrivé à cinquante, il y avait toujours le même poids. J'ai regardé à l'intérieur. Il y en avait encore tant. Je suis allé de l'avant et j'en ai donné par centaine. Mais cela ne diminuait jamais” dit Barthélémy. “Moi, je le reconnais, je n'y croyais pas. J'ai pris dans mes mains les bouchées de pain et ce petit morceau de poisson et je les regardais en disant: "A quoi cela va servir? Jésus a voulu plaisanter!…" et je les regardais, je les regardais, restant caché derrière un arbre, espérant et désespérant de les voir croître. Mais c'était toujours la même chose. J'allais revenir quand Mathieu est passé et m'a dit: "Tu as vu comme ils sont beaux?". "Quoi?" ai-je dit. "Mais les pains et les poissons!… Tu es fou? Moi je vois toujours des morceaux de pain". "Va les distribuer avec foi, et tu verras". J'ai jeté dans le panier ces quelques bouchées et je suis allé avec réticence… Et puis… Pardonne-moi, Jésus, car je suis un pécheur!” dit Thomas. “Non, tu es un esprit du monde. Tu raisonnes comme les gens du monde.” “Moi aussi, Seigneur, alors” dit l'Iscariote. “Au point que j'ai pensé donner une pièce avec le pain en pensant: "Ils mangeront ailleurs. J'espérais t'aider à faire meilleure figure. Que suis-je donc, moi? Comme Thomas ou davantage?” “Bien plus que Thomas, tu es "monde".” “Mais pourtant j'ai pensé faire l'aumône pour être Ciel! C'étaient mes deniers à moi…” “Aumône à toi-même et à ton orgueil et non pas à Dieu. Ce dernier n'en a pas besoin et l'aumône à ton orgueil est une faute, pas un mérite.” Judas baisse la tête et se tait. “Moi, de mon côté” dit Simon le Zélote “je pensais que cette bouchée de poisson, ces bouchées de pain, il me fallait les fragmenter pour qu'elles suffisent. Mais je ne doutais pas qu'elles auraient suffi pour le nombre et la valeur nutritive. Une goutte d'eau, donnée par Toi, peut être plus nourrissante qu'un banquet.” “Et vous, que pensiez-vous?” demande Pierre aux cousins de Jésus. “Nous nous rappelions Cana… et nous ne doutions pas” dit sérieusement Jude. “Et toi, Jacques, mon frère, tu n'as pensé qu'à cela?” “Non. J'ai pensé que c'était un sacrement. Comme tu m'en as parlé… Est-ce ainsi ou je me trompe?” Jésus sourit: “Oui et non. A la vérité de la puissance nutritive d'une goutte d'eau, exprimée par Simon, il faut ajouter ta pensée pour une figure lointaine. Mais ce n'est pas encore un sacrement.” Le scribe garde une croûte entre ses doigts. “Qu'en fais-tu?” “Un… souvenir.” “Je la garde, moi aussi. Je la mettrai au cou de Margziam dans un sachet” dit Pierre. “Moi, je la porterai à notre mère” dit Jean. “Et nous? Nous avons tout mangé…” disent les autres, mortifiés. “Levez-vous. Faites de nouveau le tour avec les paniers, recueillez les restes. Séparez les gens les plus pauvres d'avec les autres et amenez-les-moi ici, avec les paniers. Et puis vous, mes disciples, allez tous vers les barques et prenez le large pour aller à la plaine de Génésareth. Je vais congédier les gens après avoir fait une distribution aux plus pauvres et puis je vous rejoindrai.” Les apôtres obéissent… et reviennent avec douze paniers combles de restes, et suivis d'une trentaine de mendiants ou de personnes très misérables. “C'est bien. Allez.” Les apôtres et ceux de Jean saluent Manaën et s'en vont avec un peu de regret de quitter Jésus. Mais ils obéissent. Manaën attend, pour quitter Jésus, que la foule, aux dernières lueurs du jour, s'en aille vers les villages ou cherche une place pour dormir parmi les joncs hauts et secs. Puis il fait ses adieux. Avant lui s'en est allé le scribe, un des premiers même, parce que, avec son petit garçon, il a suivi les apôtres. Lorsque tout le monde est parti ou s'est endormi, Jésus se lève, bénit les dormeurs et à pas lents se dirige vers le lac, vers la péninsule de Tarichée élevée de quelques mètres comme si c'était une avancée de colline dans le lac. Lorsqu'il en a rejoint le pied, sans entrer dans la ville, mais en la côtoyant, il gravit le monticule et s'installe sur un rocher, pour prier, face à l'azur et à la blancheur du clair de lune dans la nuit sereine.
Extrait de la Traduction de “L’évangile tel qu’il m’a été révélé” de Maria Valtorta ©Centro Editoriale Valtortiano, Italie http://www.mariavaltorta.com/